Le monde de l’esport se soulève contre les violences sexuelles

À l’image des mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc, les langues se délient aussi dans le monde du jeu vidéo. Face aux accusations de harcèlement et d’agressions sexuelles qui se multiplient sur les réseaux sociaux, plusieurs entreprises ont décidé de réagir.

La plateforme de streaming Twitch a annoncé mercredi soir qu’elle avait ouvert une enquête au sujet des accusations les plus graves et qu’elle n’hésiterait pas à bannir définitivement certains de ses utilisateurs en fonction des conclusions de l’enquête. Depuis plusieurs jours, des centaines de personnes de l’industrie du jeu vidéo – pour la plupart des femmes – ont publiquement affirmé avoir été agressées sexuellement, harcelées ou discriminées en raison de leur sexe par d’autres joueurs. Comme cela a été le cas dans l’industrie du cinéma avec les hashtags #MeToo aux États-Unis et #BalanceTonPorc en France, de nombreuses femmes ont détaillé sur les réseaux sociaux les agissements qu’elles ont subis ces dernières années. Beaucoup d’entre elles ont même nommé leurs agresseurs présumés.

Tout est parti d’un tweet du streamer nord-américain Hollowtide le week-end dernier, dans lequel il faisait part de l’attitude très border-line d’un célèbre joueur de Destiny 2. Un message qui a permis de libérer la parole de plusieurs centaines de personnes. « Pendant longtemps, j’ai eu peur de dire quoi que ce soit. J’avais peur que cela ruine ma vie de graphiste car mon agresseur avait de l’influence et une petite place de pouvoir au sein de l’industrie du jeu vidéo », a par exemple confié la graphiste Enola Leone dans un TwitLonger samedi dernier. « J’ai vu des femmes fortes et courageuses raconter leurs expériences d’agressions, d’avances non désirées et de malaises par des hommes et des collègues créateurs de contenu dans notre industrie. Cela me met en colère et j’ai moins peur de partager mon histoire. »

Les témoignages comme celui-ci se sont accumulés et les premières réactions ne se sont pas faites attendre. Dans la soirée de mercredi, plusieurs streamers américains, comme iAmSp00n, BlessRNG ou encore Wolv21 ont été banni de la plateforme (Twitch n’a pas communiqué officiellement la liste des personnes bannies). Tous les trois ont été accusé d’agression sexuelle et leur chaîne a été temporairement fermée en attendant les conclusions de l’enquête ouverte par la plateforme américaine. De son côté le concurrent Facebook Gaming – qui fusionnera totalement avec Mixer le 22 juillet – a assuré à CNN Business qu’il prenait en compte « toutes les allégations de mauvaise conduite et nous mènerons une enquête approfondie. Nous avons un ensemble de normes communautaires claires, et nous devons travailler ensemble en tant que communauté pour éliminer toute forme de toxicité. »

Un fléau qui touche toute l’industrie

Mais ces accusations graves ne se cantonnent pas à l’univers du streaming. C’est toute l’industrie du jeu vidéo qui tente de réagir face à ces comportements illicites. Trois employés de l’éditeur français de jeux vidéo Ubisoft, connu pour des titres comme Assassin’s Creed et Just Dance, ont été accusés de mauvaise conduite. L’un d’entre eux, Ashraf Ismail, s’est retiré du projet Assassin’s Creed Valhalla cette semaine. « Je me retire de mon projet bien-aimé pour m’occuper correctement des problèmes personnels de ma vie. La vie de ma famille et la mienne sont brisées. Je suis profondément désolé pour tous ceux qui ont été blessés dans cette affaire », a expliqué sur Twitter le directeur créatif d’Ubisoft, accusé d’avoir eu des relations avec plusieurs femmes alors qu’il était marié.

D’autres structures du monde de l’esport, comme Evil Geniuses ou Method, ont mis à pied plusieurs de leurs employés pour des comportements racistes et des accusations de harcèlement sexuel.

« C’est quelque chose de nouveau de devoir faire face au harcèlement sexuel dans le monde du jeu vidéo », analyse Bo Ruberg, professeur d’études médiatiques à l’Université de Californie. « Mais les acteurs et les sociétés du secteur tentent de réagir rapidement… C’est le genre de moment où les gens semblent attendre des entreprises qu’elles répondent plus rapidement aux questions de justice sociale ».

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