
Il aura fallu attendre neuf longues années après Mafia III pour que la licence ressorte de l’ombre. Et si l’on pouvait craindre que Hangar 13 trébuche à nouveau, Mafia: The Old Country se révèle au contraire être une véritable claque, aussi bien narrative que visuelle. Loin des errements du monde ouvert mal exploité du troisième épisode, ce nouvel opus nous ramène à l’essence même de la série : une histoire captivante, servie par une mise en scène cinématographique et une direction artistique somptueuse.
Un retour aux racines : le choix de la narration avant tout
Le grand pari de Hangar 13 était de revenir à une formule plus dirigiste, à l’image des deux premiers épisodes, et de mettre le récit au centre de l’expérience. Et quel récit ! Nous incarnons Enzo Favara, un jeune Sicilien contraint de travailler dans des mines de soufre au début du XXᵉ siècle. Sa fuite dramatique, sa rencontre avec Don Torrisi, son ascension dans le milieu criminel, ses dilemmes moraux et son amour interdit pour Isabella composent une fresque digne des plus grands films de Coppola ou Scorsese.
Chaque cinématique est mise en scène avec une minutie remarquable : cadrages inspirés, dialogues finement écrits, doublage d’excellente facture… difficile de ne pas se sentir happé par cette histoire. À plusieurs reprises, j’ai eu l’impression d’assister à une superproduction hollywoodienne, la manette en main. C’est là que Mafia: The Old Country frappe le plus fort : il ne raconte pas une histoire, il nous la fait vivre.

Un gameplay varié, pensé pour servir l’histoire
Si Mafia III avait parfois donné l’impression de répéter sans cesse les mêmes mécaniques, The Old Country multiplie les séquences de jeu et propose une belle variété :
- Des fusillades intenses, avec un système de couverture classique mais efficace, et des armes d’époque au rendu sonore explosif.
- Des duels au couteau dramatiques, techniques et mis en scène avec brio, qui rappellent les affrontements chorégraphiés du cinéma.
- Des courses haletantes, que ce soit à pied, à cheval ou en voiture d’époque. La seule course automobile du jeu, notamment, reste un moment de bravoure inoubliable.
- Des phases d’infiltration accessibles, qui permettent de varier le rythme et de souffler entre deux séquences plus musclées.
Certes, ces phases de gameplay ne sont pas toutes irréprochables : la visée peut paraître un peu datée, les duels au couteau reviennent peut-être un peu trop souvent, et l’IA n’est pas toujours brillante. Mais ces petites imperfections ne nuisent jamais réellement au plaisir de jeu. Elles servent surtout à rythmer une aventure où la priorité reste l’immersion narrative.
Une Sicile vivante et dépaysante
Techniquement, The Old Country surprend agréablement. La Sicile de 1904 est reconstituée avec une authenticité bluffante : villages de pierre baignés de soleil, vignobles ondoyants, marchés animés, ruelles étroites, paysages volcaniques inquiétants… chaque décor respire la chaleur méditerranéenne.
Sur PlayStation 5, les visages sont d’un réalisme saisissant, les jeux de lumière superbes, et la bande-son, mêlant compositions originales et sonorités siciliennes traditionnelles, parachève une immersion totale. J’ai relevé quelques rares ralentissements et des textures qui tardent à se charger à l’arrière-plan, mais rien qui n’entame la qualité globale du rendu. Pour un jeu vendu en dessous de 50€, le niveau de finition force le respect.

Des personnages charismatiques et inoubliables
Un récit fort ne vaut que par la force de ses personnages, et The Old Country ne déçoit jamais à ce niveau. Enzo est un protagoniste attachant, partagé entre loyauté et désir de liberté. Isabella, figure tragique prisonnière de son nom, apporte une dimension romantique poignante. Don Torrisi, véritable patriarche mafieux, incarne la puissance et la menace, sans jamais tomber dans la caricature. Même les seconds rôles bénéficient d’un soin particulier, avec des dialogues travaillés et des arcs narratifs crédibles.
J’ai rarement vu un jeu vidéo où chaque personnage, principal ou secondaire, contribuait autant à la cohérence et à la richesse de l’univers. C’est ce qui rend l’expérience si mémorable : on ne traverse pas simplement un décor, on vit une histoire aux multiples facettes, où chaque rencontre compte.
Une structure linéaire assumée, mais généreuse
Le jeu n’est pas un open world à proprement parler, même si San Celeste et ses environs peuvent être explorés librement par moments. Certains regretteront peut-être que ce monde ouvert soit sous-exploité, mais j’ai trouvé ce choix cohérent : le récit gagne en intensité et ne s’éparpille jamais.
Pour les amateurs d’activités annexes, quelques quêtes secondaires et objets à collectionner viennent prolonger l’expérience. Mais le cœur du jeu reste cette campagne d’une quinzaine d’heures, dense, sans temps mort, et rejouable grâce à la possibilité de revivre certains chapitres marquants.

Un rapport qualité-prix imbattable
Dans un marché où la plupart des productions triple-A flirtent avec les 70 ou 80€, voir Mafia: The Old Country proposé sous la barre des 50€ est une excellente surprise. Ce tarif attractif prouve que Hangar 13 et 2K ont voulu privilégier l’accessibilité, sans rogner sur la qualité. Et pour un titre qui offre une histoire aussi dense, des séquences mémorables et une réalisation aussi soignée, difficile d’imaginer meilleure affaire.
Verdict : un candidat sérieux au GOTY
En quittant les États-Unis pour revenir en Sicile, Mafia: The Old Country ne se contente pas de changer de décor. Il redéfinit ce qu’est la licence : une série avant tout narrative, capable de rivaliser avec les plus grands films mafieux. Malgré quelques petits défauts de gameplay, l’expérience reste magistrale.
Avec son scénario captivant, sa mise en scène grandiose, ses personnages charismatiques et son prix attractif, Mafia: The Old Country s’impose comme l’un des titres les plus marquants de l’année. Une fresque dramatique, brutale et touchante, qui prouve qu’en 2025, le jeu vidéo peut encore nous offrir des récits inoubliables.