À quelques jours du BLAST Premier: Fall Final, qui se déroule du 22 au 26 novembre à Copenhague (Danemark), Rémy « XTQZZZ » Quoniam nous a accordé une interview. Le coach de 34 ans y évoque notamment ses passages chez G2 et TSM, son retour très attendu chez Vitality et ses ambitions sur Counter-Strike 2 avec la structure française.
Peux-tu me parler de ton retour chez Vitality. Comment ça c’est fait et quel est ton ressenti ?
« J’ai toujours gardé contact avec eux. En début d’année j’ai travaillé pour Vitality en consulting, du coup je savais ce qu’il s’y passait. Quand je suis parti pour coacher chez TSM j’avais forcément moins de contacts, simplement des nouvelles de ceux que je connais. Puis Neo (Fabien Devide, le CEO de Vitality) m’a appelé en me disant que Zonic allait partir et pour me demander si j’étais prêt à revenir. J’y ai réfléchi, j’ai pesé le pour et le contre. Parce que ça faisait même pas un mois avec TSM donc ça m’emmerdé un peu pour les gars, ceux que j’ai ramenés. Mais rapidement je me suis dit que je ne pouvais pas refuser l’offre de Vitality. Il n’y avait pas d’euphorie, je suis juste resté pragmatique. »
En quoi tes passages chez G2 et TSM peuvent t’aider avec Vitality ?
« Chez G2 ça a quand même duré 9 mois. J’ai pu surtout me rendre compte de quoi j’avais vraiment besoin. De quels outils j’avais besoin pour performer en tant que coach. Comment être efficace dans mon travail. Et j’essaie de l’appliquer aujourd’hui chez Vita. De TSM je n’ai pas eu grand chose à retenir, ça n’a duré qu’un mois. »
Tu n’étais plus le coach de Vitality quand ils ont remporté le Major à Paris. C’est un regret pour toi ? Ou est-ce que ça te motive encore plus pour l’avenir ?
« Un regret ? Non. Comme j’ai dit j’étais en consulting pour Vitality, en plus je commentais le Major donc j’étais à fond dedans. Au contraire, j’ai des amis là-bas donc j’étais surtout très content pour eux. Mais je ne peux pas avoir de regret, ce n’est pas de ma faute si quand on est numéro 1 avec l’équipe française chez Vitality on est en plein Covid et il n’y a pas de Major. Il n’y a pas de regret, c’est juste comme ça… »
Comment on arrive à motiver une équipe qui a décroché le Graal en 2023, en plus à Paris (pour une équipe française, avec ZywOo et apEX) ?
« Malgré ça je pense que c’est très facile. Déjà parce qu’on est sur une nouvelle version de CS, donc il faut apprendre plein de nouvelles choses. Deuxièmement, encore une fois malgré eux, il y a des changements dans l’équipe. De joueurs, de staff… Dans le cas d’apEX c’est assez facile parce qu’il a vraiment envie de gagner sur CS2. Pour ZywOo, il est encore neuf. C’est vrai qu’on a l’impression qu’il est là depuis longtemps, mais il encore très jeune (23 ans). Il a encore son histoire à écrire, elle est loin d’être finie. Donc à mon sens ça doit être très facile pour lui de savoir où il veut aller, et bien sûr si ce n’est pas le cas c’est aussi notre rôle de le motiver et l’accompagner. Et puis tous les deux ils ont toujours cette ambition de gagner d’autres titres. Il ne faut pas avoir peur d’être gourmands ! »
Est-ce que tu vois des points communs et des différences avec les précédents rosters que tu as eu sous tes ordres chez Vitality ?
« Déjà côté similitudes il y a forcément le lead de Dan (apEX). On a travaillé dessus pendant plus de deux ans, donc je sais comment il pense, comment il veut préparer les games, les jouer… ce qu’il aime. Sur ce point là, il n’y a pas eu de changement depuis que je suis parti. Maintenant il y a aussi des grosses différences : la langue, les joueurs. Une partie du projet Vitality était de former des jeunes en devenir ; là on a misé sur des compétiteurs chevronnés, notamment Spinx qui est l’un des meilleurs joueurs du monde. Donc l’approche est largement différente. Avant on était plus dans de l’accompagnement, voire du ‘babysitting’ pour les Français. Maintenant il faut apprendre à gérer les égos, il faut donner de la confiance et des responsabilités à des joueurs déjà très forts. Il ne faut pas leur expliquer de A à Z comment être bon au jeu, ils le savent déjà. »
Ce roster est-il le meilleur que Vitality a jamais eu ?
« Que j’ai pu connaître, c’est sûr. Même si en 2019-2020 on a été numéro 2 et numéro 1, donc ce n’est pas rien. Mais les époques sont différentes, le niveau est plus relevé maintenant. En terme de potentiel, je pense que le roster actuel est le plus fort. »
Ton avis sur Counter-Strike 2 ? Qu’est-ce qu’il apporte de nouveau ?
« Moi j’aime bien pour l’instant. J’aime toujours découvrir de nouvelles choses. Sur CS:GO on a tout fait, honnêtement à la fin plus rien ne te surprend. Ce qui faisait la différence c’était le momentum, le mental, c’était juste de bien enchaîner tes calls. Là maintenant tu peux – pendant un certain temps – surprendre ton adversaire, te dire : ‘Ah tiens, ça on l’avait jamais pris’. Et ça je trouve que c’est cool. L’aspect tactique a changé aussi avec notamment les utilitaires et même la puissance du sniper qui était franchement la meilleure arme du jeu sur CS:GO. Je ne dis pas que c’est plus le cas sur CS2, mais on doit se réinventer. Certes ça crée de l’incertitude pour tout le monde mais à la fois c’est très excitant. En entraînement j’aime bien qu’on se fasse un petit peu avoir, outplay, par une stratégie qu’on ne connaît pas. »
« Donc je suis plutôt satisfait. Il y a encore des choses à améliorer. Il manque notamment beaucoup de commandes que tu pouvais avoir sur CS:GO pour fluidifier le jeu. Pour t’entraîner aussi, on n’a toujours pas de commande pour les coachs… Mais je vois quand même que Valve est réactif, avec des mises à jour régulièrement. Donc je suis plutôt hypé et positif, j’ai envie de voir ce que ça donnera en compétition. »
Si tu pouvais changer quelque chose dans CS2 ?
« Beaucoup parlent du ‘peak advantage’, mais je ne sais pas si j’ai envie de le changer. Tout le monde se plaint, même nous parfois, mais est-ce que ce n’est pas ce que CS veut devenir ? Donc même si ce n’est pas à notre avantage parce qu’on a ZywOo, le fait que le snipe soit moins fort à cause du ‘peak advantage’ ne me dérange pas spécialement. Depuis des années, 7-8 ans, le meilleur joueur du monde est à chaque fois un sniper. Donc se dire que maintenant ce sera peut-être un joueur plus polyvalent, je trouve ça bien aussi. »
« Si, je changerai quand même les smokes, qui font un peu tout et n’importe quoi. Aujourd’hui tu peux couvrir le mont Everest avec ! Au début j’étais sceptique concernant le changement des HE (grenade), qui te donnent la vision dans les smokes. Mais au final je vois ce changement plutôt d’un bon œil, ça demande un peu plus de technique et de réflexion, des qualités que j’apprécie beaucoup. Pour l’instant, les plus gros problèmes concernent la stabilité du jeu, les crashs, les bugs – et on va en découvrir plein de nouveaux – donc surtout des détails à corriger, mais c’est normal pour un nouveau jeu. »
Pour l’instant, y a-t-il des joueurs qui t’on impressionné sur CS2 ?
« Ce n’est pas un secret, ceux qui jouent le plus et qui ont travaillé le plus sont les meilleurs. Bien sûr le petit Donk de chez Spirit, qui a 16 ans et qui passe sa vie à jouer. Il est incroyablement fort et je pense que d’ici deux ans on en parlera comme le meilleur rifle du monde, si il continue sur sa lancée. Ropz (FaZe Clan) aussi, il a vite lâché CS:GO pour CS2 donc il a un petit temps d’avance. Mais chez Vita on n’est pas à plaindre, Spinx est en très grande forme. Si il est aussi performant en officiel qu’à l’entraînement, je pense que les gens seront choqués. Et Mathou (ZywOo) est en train de bien revenir. Il monte en puissance et j’espère que ça va se concrétiser sur les prochains tournois. Je vous le dis, le meilleur joueur du monde est toujours chez Vitality. »
Quels sont les objectifs de l’équipe pour les prochaines échéances ? BLAST Premier: World Final et PGL Major à Copenhague…
« Notre objectif est simple : être prêt pour le RMR Major (en février, pour ensuite se qualifier au PGL de Copenhague du 17 au 31 mars 2024). Alors, prêt dans ce qu’on peut contrôler, peut-être que d’ici là il y aura des mises à jours profondes sur CS2. Mais en tant qu’équipe et individus on veut déjà être à l’aise sur le jeu. Maintenant pour le BLAST Premier: Fall Final on a 10 jours d’entraînement dans les jambes, donc moi j’estime qu’on se doit d’être performants. Mais quand je vois l’adversité et notre niveau actuel, j’arrive très bien à imaginer qu’on ne passe pas les groupes, et j’arrive très bien à imaginer aussi qu’on puisse gagner le tournoi. Il y a une énorme incertitude sur tout le monde : 5 équipes arrivent avec un roster différent et les 3 autres ne connaissent pas leur futur. Donc autant dire qu’il n’y a pas énormément de pression sur tout le monde, c’est surtout un bon moyen d’apprendre sur ce nouveau jeu. »
« Pour le BLAST Premier: World Final on visera plus de la performance. C’est le dernier tournoi de l’année, et il permet souvent aux équipes qui le gagnent de bien démarrer l’année suivante. G2 l’année dernière, c’était le cas pour Na’Vi aussi… Ce tournoi donne souvent la tendance d’un début de saison. Et ce sera d’autant plus important pour nous cette année parce que l’IEM Katowice arrive très très vite derrière. »
Et toi personnellement, as-tu un objectif à atteindre avec cette équipe ?
« Moi ce qui est sûr c’est que je suis revenu pour trois ans, donc j’ai évidement pour objectif de gagner un Major. C’est un des titres qui me manque dans ma carrière. Et pour Vita j’aimerais aussi gagner l’IEM Cologne ou Katowice, des tournois qui n’ont pas vraiment réussi à la structure jusqu’à présent. Donc je veux en gagner un des deux, parce que hors Major c’est vraiment les deux plus gros tournois. »